Une voyante. Tu t’étais soudainement figée lorsque cette dernière t’avais fait signe, à toi et à trois autres de tes camarades. Tu leur jettes un regard, mais tu te décides finalement à avancer. Tu ne sais pas trop à quoi t’attendre : certaines de ces voyantes étaient douées, d’autres à peine meilleures que toi en divination. Toutes se prenaient souvent très au sérieux, cependant, ce qui ne t’aidait pas à émettre un jugement sur celle-ci. Quelqu’un devrait se prononcer. Lancer une question, jouer le jeu. Mais toi, tu n’avais que des questions sérieuses à lui poser. Rien que tu pouvais faire ici, maintenant, sans plomber définitivement l’ambiance. Tu aurais très bien pu lui demander si ta maladie allait progresser. Ou carrément si elle allait t’emporter bientôt. Tu aurais pu lui demander ce que tu ferais plus tard (en espérant n’être pas encore morte.) Si tu fonderais une famille. Mais, au cas où cette voyante était vraiment douée, tu ne voulais pas faire peur à tes amis et tu te retins donc de poser les questions qui brûlaient tes lèvres. Tu te dépêchas donc d’en trouver une autre, plus innocente, dont la réponse n’aurait aucune conséquence pour toi ni pour eux. Vous vous amusiez en ce moment, alors il n’était pas question de plomber l’ambiance d’une quelconque manière. De toute façon, tu n’étais même pas certaine de vouloir savoir ce qui t’attendait. Ne serais-tu pas encore plus fataliste que tu l’étais en ce moment? Probablement, surtout si c’était des mauvaises nouvelles. Mais si c’en était des bonnes, pourrais-tu t’enlever un poids sur le cœur? Peut-être. Peut-être pas. Tu finirais probablement par dire qu’elle ne savait pas de quoi elle parlait et tu virerais paranoïaque de toute façon. Donc, mauvaise idée.

Tu regardes une nouvelle fois tes amis, et tu hausses un sourcil. Comme personne ne semble daigner s’approcher, tu fais un pas en avant et tu salues gentiment la voyante. Tu ne sais pas encore quelle question tu vas poser, mais tu sais qu’elle sera sans importance, ou plutôt sans conséquences graves. Alors, avec un grand sourire, tu te lances.

FULMINA « Est-ce que Nolan va aimer la prochaine chanson que je vais écrire pour notre groupe? »

Tu jettes un regard espiègle à ton ami, en arrière de toi. On verra bien. La voyante te regarde un moment, ferme les yeux, se concentre. Puis, elle les rouvre.

VOYANTE « As-tu pensé à nourrir ton chat, mon enfant? »

Tu te retiens difficilement pour ne pas rire. Une chance que tu as décidé de ne rien demande de sérieux.

FULMINA « Je n'ai pas de chat, madame. »

HJ : J'ai fait court, pour qu'on puisse avancer ♥

Une voyante ? Sérieusement ? C’était bien une chose à laquelle il ne croyait pas, ok, il vivait dans un monde magique, mais ça n’empêchait pas les charlatans d’exister, surtout dans ce domaine là d’ailleurs. Dire que c’était une science approximative c’était bien plus qu’un euphémisme. Il n’aurait pas été contre de simplement continuer son chemin et ignorer cette vieille sorcière ; il était censé s’amuser non ? Pas écouter les sornettes d’une harpie croyant pouvoir résoudre tous les problèmes en regardant dans une boule de Crystal. Mais apparemment Fulmina ne semblait pas de cette avis. Après avoir levé les yeux au ciel, et attendu un petit instant sur place, histoire de bien montrer qu’il n’était pas spécialement partant, il finit par suivre les filles.

C’était bien des filles tiens, essayer de savoir ce qui allait arriver en suite, elles ne pouvaient pas simplement attendre, ce n’était pas comme si le destin était tout tracé si ? Nolan détestait cette idée, qu’on lui enlève sa liberté, c’était quasiment de la hantise à ce niveau là, il faisait ce qu’il voulait, quand il le voulait, c’est tout, et rien ne pouvait le prévoir à l’avance, excepté lui. De plus à force de voir des films moldus, le jeune homme s’était bien rendu compte qu’en savoir un peu trop sur le futur, ça finissait bien trop souvent en problème. Non, il n’avait aucune envie d’en savoir plus surtout que même s’il ne voulait pas y croire, il savait que du moment qu‘elle lui mettrait une idée dans la tête, il ne pourrait pas s‘empêcher de la voir par tout. Il ne voulait donc rien savoir ! C’est tout ! Aussi resta-t-il un peu en retrait derrière les filles.

« Est-ce que Nolan va aimer la prochaine chanson que je vais écrire pour notre groupe? » Bah voyons ! Le gryffondor croisa les bras et marmonna dans sa barbe que ça n’arriverait pas. Elle voulait pas se mettre à la guitare et à la batterie aussi ? Histoire de tout faire ? Bon, ok, c’était simplement de la jalousie mal placé, mais il n’aurait pas été contre avoir une voix comme celle de la jeune femme, et il détestait le fait de ne pas tout contrôler, entre l’énergie de Robyn et le talent de Fulmina, il se demandait encore parfois si c’était son groupe. Sa mauvaise humeur fut rapidement chassé, autant par le regard de la poufsouffle que par la réponse de la voyante. Il se mordit la lèvre un instant, histoire de ne pas simplement explosé de rire, mais ça ne dura pas longtemps quand la jeune femme annonça qu’elle n’avait pas de chat. « Jolie hors sujet madame Irma » articula-t-il entre deux fous rires. Il était franchement rassuré qu’elle n’est apparemment aucun don. « Pourquoi ne pas nous annoncer qu’Aaron va rentrer dans une équipe de Quidditch tant qu’on y est » Dans le genre impossible, c’était pas mal aussi … « Enfin je passe mon tour, donc après vous » conclut t’il en désignant la vieille femme du menton à Jenna et Aaron. Ne pas vexer la voyante en se foutant ouvertement de ses stupides prédictions ? Pourquoi ça ?

- As-tu pensé à nourrir ton chat, mon enfant ?
La voyante avait donné cette réponse qui visiblement n’avait aucun sens, me confortant dans le scepticisme que je ressentais face à cette personne qui se disait capable de lire en nous. Nolan répondit par un sarcasme qui me fit sourire. Je ne savais plus pourquoi nous nous étions retrouvés ici, peut-être simplement pour rire des absurdités que serait capable de nous sortir cette soi-disant voyante. C’était bien parti pour être drôle, songeai-je durant un instant. Mais mon avis fut bientôt changé lorsque la vieille dame tourna son regard vers moi :
- C’est à toi que je parlais, mon enfant. As-tu pensé à nourrir ton chat ?
Elle n’était clairement pas en train de jouer à un petit manège pour tenter de se rattraper en trouvant quelqu’un parmi nous qui aurait un chat. Cette question m’était bien destinée. Le chat, aussi libre et indépendant que moi. Cet animal qui n’avait aucune attache. Mon patronus. Soudain fascinée, je m’approchai de la petite table surmontée d’une nappe à motifs d’inspiration orientale, et demandai :
- Comment est-ce que vous savez ?
- Je lis en toi, mon enfant.
- Mais qu’est ce que ça veut dire, « nourrir » ?
- Ne perds pas de vue ce que tu es.
C’était maintenant limpide : mon patronus représentait tout de moi, mon passé et surtout la manière dont je m’étais construite.
Je reculai, pensive, laissant Aaron s’avancer. Sous le regard de Nolan, toujours aussi peu friand des prédictions de Mme Irma, je me sentis toute bête. Je n’avais jamais réellement cru en la divination, ces choses là n’avaient toujours été que des sornettes pour moi, et j’étais là, en train de donner du sens à des paroles qui n’en ont peut-être aucun. Comment savoir si elle avait lâché ces phrases tellement vagues, en sachant pertinemment que je leur trouverai de moi-même une raison d’être, ou bien si elle avait réellement vu ce que j’étais ? La situation était particulièrement troublante. J’avais envie d’y croire, tout en trouvant cela parfaitement ridicule.
A quel moment avais-je perdu de vue ce que j’étais ?
Je ne voyais pas…
Allons bon, il ne fallait pas se sentir perturbé par tout cela. C’était dans le quotidien des voyantes de nous dire des choses qui auraient une très grande probabilité de nous toucher, sans même avoir lu quoi que ce soit en nous. Elle avait vu que sa question sur le chat de Fulmina n’avait aucun sens et m’avait désignée moi pour regagner en crédit. C’était tout.
Le plus amusant serait maintenant de la laisser penser que je croyais en sa science des plus inexactes et de la faire s’enfoncer sans ses idioties. Nolan et moi échangèrent un regard complice lorsqu’il vit que j’étais revenue à moi et nous nous comprîmes silencieusement quant à la façon dont nous allions occuper l’heure à venir.

Spoiler: