«Pourquoi souriez-vous ainsi Miss McCardle ?»

Le professeur d'étude des runes regardait Rosaleen, sceptique, devant le grand sourire qu'elle affichait. Cette remarque la fit rire, et le regard du professeur se fit encore plus critique. Mais Rose s'en fichait bien, la pensée qui venait de la traverser l'emplissait de joie, elle ne pouvait qu'ignorer les empêcheurs de tourner en rond.

«Pour rien, excusez moi.»

Il la regarda encore une longue seconde et, comprenant qu'il n'obtiendrait d'elle rien de plus, il se détourna et recommença la traduction du texte qu'ils étaient en train d'étudier. Rose gloussa encore une dernière fois, et il tiqua sans se retourner.

Il était 16h, la journée avait été longue, et Rose s'était sentie partir quelques fois déjà. Sa nuit avait été agitée : elle s'était réveillée plusieurs fois en nage après un cauchemar qui recommençait dès qu'elle fermait les yeux. Néanmoins, elle ne s'en était pas souvenue à son réveil définitif, et elle en était bien heureuse. Le sentiment qui l'accompagnait n'était pas agréable du tout, mieux valait ne pas s'en rappeler. A présent, cet épisode était totalement sorti de son esprit, après les cours qu'elle avait eu et qui lui avaient lessivé le cerveau à coup de mots.

La pensée qui l'avait tirée de la monotonie pouvait être qualifiée de projet. Son esprit avait dérivé vers Pré-au-Lard, et tandis que ses souvenirs l'emportaient le long de la grand rue, le pub des Trois Balais avait retenu toute son attention. Cela faisait presque une semaine qu'elle n'y était pas entrée. Presque une semaine qu'elle n'avait pas ri. Alors la décision de s'y rendre le soir même s'était imposée à elle, et la bonne humeur s'était insufflée dans tout son corps, la réveillant aussi bien qu'un dopant. Une bonne bieraubeurre ne pourrait pas lui faire de tort !




La clochette ne se fit même pas entendre lorsque Rosaleen entra, tellement l'endroit était bondé. C'était normal : par les temps qui courraient, tout le monde avait envie de mettre un peu de joie dans son quotidien. Ici, les gens buvaient pour oublier la morosité, la peur et la pluie qu'ils vivaient au quotidien. Ils venaient ici pour échapper à leur femme ou à leur mari, pour rencontrer des amis, pour fêter un anniversaire, ou simplement pour ne plus se sentir seuls. Rose étaient de ces gens qui fuyaient la solitude comme la peste, et qui déprimait dès qu'ils se retrouvaient sans compagnie. Et puisqu'elle connaissait la plupart des gens du village, elle était certaine de se trouver un compagnon ou une compagne pour aller danser.

Elle s'assit d'abord au bar et commanda une bieraubeurre, qu'elle savoura pleinement pendant quelques minutes, s’extasiant du délice qu'elle procurait à ses papilles et de la chaleur, que la pluie avait annihilée, qui se répandait dans son corps. Malheureusement, elle se termina trop vite et elle dut se retenir d'en commander une deuxième. Il était déjà tard, mais elle n'avait pas énormément d'argent pour s'offrir des verres toute la soirée. Au mieux, elle trouverait un ami dans le verre de qui elle pourrait boire une gorgée !

Comme personne ne venait l'aborder, Rose décida de se lever et d'aller au milieu des danseurs pour une gigue improvisée. Elle rit aux éclats, se trouvant presque soûle alors qu'elle n'avait pas ingurgité d'alcool, dansa comme une véritable irlandaise qu'elle était. Les gens la regardaient en riant, car c'est elle qui commençait toutes les danses et qui entraînait tout le monde dans sa suite pour les farandoles. Elle en oubliait presque la menace qui planait... Mais là était le but : oublier.

I wanna scream and shout, and let it all out

And scream and shout, and let it out

J’avais besoin de m’amuser. J’avais besoin de penser à autre chose. J’avais simplement besoin d’oublier et de vivre, de surmonter tout ça. J’avais vraiment besoin de me changer les idées et quoi de mieux que de sortir un bon coup et de s’amuser sans vraiment faire attention à ce que l’on fait. J’avais demandé à mes deux amies de venir avec moi au pub les Trois Balais. Aucune des deux n’avait accepté mon invitation trouvant ça trop nul ou pas assez bien. J’avais râlé. J’avais vraiment envie d’y aller, de sortir et de faire la fête. J’avais décidé d’y aller quand même mais j’étais déçue que mes amies ne veuillent pas partager un agréable moment en ma compagnie. J’étais donc parti explorer les magasins pour y faire des trouvailles pour m’habiller à peu près correctement ce soir. J’avais perdu pas mal d’affaires dans la crue au final et c’était une plaie de devoir tout racheter. J’avais finalement mis la main sur un jean skinny, un petit haut sympathique et des chaussures assez cools et féminines. Une fois mes emplettes de faites, je rentrais à la maison que nous avions pris pour notre voyage à Poudlard afin de me préparer. Une bonne douche bien chaude pour détendre mes muscles encore un peu meurtris par la crue et je fus quelque peu requinquée après le coup de barre que j’avais eu en rentrant. Je m’étais habillée assez rapidement, coiffée, maquillée enfin préparée quoi et une fois prête, je partis pour le pub. Je marchais dans les rues pour me détendre, passant par des chemins que j’avais souvent empruntés depuis que j’étais arrivée en Ecosse. J’aimais beaucoup Pré-au-Lard mais, je ne quitterais jamais Londres pour Poudlard. Londres avait un charme que Poudlard n’a pas à mes yeux. Je ne saurais dire ce que c’est mais, il y avait cette différence qui faisait que mon cœur appartenait toujours à Londres.

Lorsque j’entrais dans le pub, je me dirigeai immédiatement vers le bar où je commandai une biereaubeurre. Et puis, de fils en aiguilles, il y en a eu une autre, puis une autre et finalement, je commençai à être joyeuse. Je n’étais pas normalement de ces personnes qui boivent pour oublier ou faire la fête mais, j’étais tellement angoissée au fond de moi que je me suis laissé emportée par l’ivresse et le barman qui venait constamment me demander si je voulais un autre verre. Bien évidemment, comme toute personne normalement constituée, vint le moment où j’eus besoin d’aller me soulager. S’il y avait bien une boisson qui faisait cet effet quand on en boit trop c’est la bière. Je me rinçai le visage au passage, me rafraichit la nuque, fit un chignon de mes cheveux que j’avais laissé lâches à la base et repartit pour le bar. Sauf que voilà, en chemin, je rentrai sans le vouloir dans une fille qui dansait au milieu. Le pub était bondé de monde. On ne pouvait pas faire un pas sans être à deux doigts de se cogner à quelqu’un. J’avais pourtant fait attention vu ma maladresse mais apparemment, j’aurais dû redoubler de prudence vu mon état et le monde. Elle avait l’air d’entrainer tout le monde avec elle et de s’amuser. « Pardon, je suis vraiment désolée. Je ne vous ai pas fait mal au moins ? » Je l’aidai à se relever après l’avoir fait trébucher. Elle avait l’air plus amochée que moi. Je lui souris. « Je m’appelle Jane. » Je lui souris à nouveau. « Tu veux venir au bar prendre un verre avec moi ? Je suis toute seule et c’est pas si drôle que ça de boire un verre seule. » Wow. Je devais être plus amochée que je le pensais par l’alcool et ses effets. Ce que je venais de dire n’avait pas vraiment de sens.