Je descends de mon balais qui malgré les vertus que lui vantait l’homme qui me l’a vendu, n’est pas vraiment destiné à un tel trajet. Après quelques mésaventures avec le transplanage, j’ai préféré ne plus réitérer l’expérience et puis Londres - Poudlard est quand même un trajet bien plus court que mon précédent voyage. Retourner à Poudlard me parait si étrange après tout ce que je viens de vivre ; les duels, les fuites, la terreur présente dans chaque rue sorcière. Je dois dire que ne plus aller en cours me désole presque, de savoir qu’on n’aura pas l’occasion de passer l’ASPIC à la fin de l’année m’ennuie et me dire que mes derniers mois de scolarité à Poudlard me sont enlevés me rend triste. J’ai toujours apprécié le temps passé ici, me rendre dans ce nouvel univers qui m’ouvrait grand ses portes m’a changé, les gens que j’y ai rencontré aussi. J’ai peur de ne plus revoir mes amis, quand je repense à Louve qui combat en France - qui sait où pourrait-elle bien être après tout le temps qui s’est écoulé ? - je ne peux retenir un soupir qui dissimule les larmes que je me retiens de laisser couler.

Alors que j’avance dans Poudlard, perdu dans mes pensées nostalgiques, j’ouvre la grande porte qui me permettra d’entrer dans le château dont j’admire une derrière fois la façade avant de m’y engouffrer le plus discrètement possible, le lieu est presque désert, je ne saurai dire si certains élèves résident encore ici, je doute que les premières et deuxièmes années n’aient pas voulu rentrer chez leurs parents en ce moment où toutes les barrières des trois grandes écoles de l’univers magiques sont tombées. Mais je ne perds pas de temps et évite de m’attarder sur les quelques visages tristes que je croise dans les couloirs. Je monte directement les escaliers pour rejoindre la tour des Serdaigles.

C’est en entrant dans la salle commune que les larmes sont les plus dures à retenir, chaque angle, meuble ou livre que je vois ici me ramène à un souvenir. J’ai considéré ce lieu comme ma maison pendant si longtemps, il faut dire que je n’avais pas vraiment d’alternative. Je longe les murs et rejoins ma chambre où je m’empresse de faire mon sac sans m’attarder sur toutes les affaires laissées à l’abandon dans le dortoir, mieux vaut ne pas savoir ce que sont devenus leurs propriétaires. Alors que je m’apprêtais à tout ranger manuellement, je réalise que personne ne viendra me réprimander d’utiliser ma baguette. Traîner dans les rues de Londres sans me soucier des interdictions du ministère me procura un vrai sentiment de liberté, dans un peu plus de cinq mois je serai majeur et je profite pourtant déjà de tous les avantages. Malgré les difficultés d’un contexte de guerre civile, j’ai réussi à en tirer certains profits. Je range donc toutes mes affaires dans un sac parfaitement adapté pour qu’il puisse tenir sur mon dos en toutes circonstances, un petit bijou découvert dans l’allée des embrumes qui malgré sa mauvaise réputation cache de vrais petits bijoux à prix très abordables… d’où la mauvaise réputation… Je profite de la salle commune pour me changer, faire ma toilette et m’allonger un peu dans le lit, profiter d’un repos bien mérité.

J’aimerai m’endormir, mais je n’y arrive pas. Je n’ai pas encore eu le temps de vraiment réfléchir à tout ce qui s’est passé en quelques jours et ce petit temps de repos m’ouvre un porte vers ce genre de pensées. Seulement je ne me sens pas prêt, pas prêt pour repenser à tous les cadavres sur lesquelles j’ai marché, pas prêt pour revoir le visage de mes amis s’effacer à mesure que mon transplanage s’amorçait, pas prêt pour me demander ce que sont devenus les gens que j’ai croisé à Londres. Alors je me redresse, chasse mes idées noires d’un passage de doigts dans mes cheveux démêlés et j’entreprends de me rendre à la bibliothèque du château histoire d’emporter quelques livres qui pourraient souffrir d’une attaque à Poudlard - et puis aussi parce que ça m’arrange et que je les aime bien… - Je quitte la salle commune sans me retourner et descends lentement les escaliers.

Et là je le vois, dans la cage d’escaliers, de dos à moi, il ne doit pas m’avoir vu. Alors je cours, persuadé qu’il est celui que j’espère trouver, après l’avoir vu presque chaque jours de ces sept dernières années il est impensable que je le confonde avec quelqu’un d’autre. Lorsque j’arrive à sa hauteur, je ne tiens plus et dans l’élan de ma course crie : Bryan ! Retourne toi vieille peau ! Les gens nous donnent toujours quelques années d’écart, le considérant plus âgé que moi, ce qui est faux, totalement faux ! Mais j’en profite pour lui trouver un autre surnom.

Savoir qu’il est là, que je vais le retrouver, que je ne serai plus seul, que je retrouve mes repères m’arrache un soupir de soulagement si fort que je m’arrête de courir, attendant qu’il me rejoigne pour pouvoir lui parler. Je reprends mes esprits et les mots partent dans tous les sens sans vraiment que mes phrases n’aient de sens T’étais à Beauxbâtons ? .. Que… quoi… comment … que fais tu là ? Pourquoi ? Comment t’es arrivé là ? T’as vu Louve, Ibrahim ? On doit se retrouver… Pendant la guerre, il faut reformer le carré pour ne perdre aucun des cotés. Le « carré parfait », voilà une chose qui me tenait à cœur depuis nos rencontres, la preuve que les quatre maisons ne sont pas des frontières infranchissables à l’amitié, que notre union malgré nos couleurs montrent que Poudlard est aussi une école unie et surtout que nous quatre, nous sommes proches les uns des autres. Essoufflé, je pose ma main sur son épaule comme pour reprendre mon souffle et dirige mon regard vers son visage qui m’est si familier.

Dans la vie tu as le droit à deux choix, combattre et périr ou te cacher et perdre toute la confiance qui était chez toi. Moi je n’avais pas eu le choix entre ses deux choses qui s’imposaient à moi. Je voulais combattre mais je ne pouvais pas bouger, j’avais tellement changé depuis le temps où l’Organisation était devenue maitresse des écoles. Je n’étais plus ce gentil personnage que j’avais pu être avant, fini les jours de retards aux cours. Fini les sorties avec mes meilleurs amis, fini tout était fini. Sauf mon amour, mon amour passionnée était encore vivant, il était encore debout. Oui j’étais devenu si amoureux mais j’avais changé de caractère, je n’étais plus le même. Je ne pouvais plus m’approcher de quelqu’un sans l’agresser. Je devenais si méchant, je devenais comme eux. Je devenais comme un membre de cette organisation si noire.

Je ne sais pas pourquoi mais je ne pouvais pas rester là-bas, là-bas ils se battaient tous pour la liberté, j’avais fait ma part du boulot, oui durant la mission avec les centaures, j’avais été poursuivi par ses hommes masqués mais les autres s’étaient sacrifié pour moi étant un Préfet en Chef, j’avais honte… si honte de moi que je ne pouvais même plus me voir dans un miroir. Pourquoi les autres venaient à ceux sacrifier pour quelqu’un comme moi, quelqu’un qui faisait du mal à une de ses meilleures amies. Pourquoi j’avais osé porter ma main sur une statue juste pour une cachoterie. Pourquoi j’avais brisé le cœur de ma propre demi-sœur. Je ne me rendais pas compte, je réfléchissais sur mon lit, mes larmes commençaient peu à peu à couler et ma haine, cette haine était toujours là. C’était leurs fautes, ils m’avaient changé. J’étais devenu si dangereux que je ne voulais pas me battre. J’étais plongé dans mes pensées et je regardais par la fenêtre… je n’allais encore rien faire aujourd’hui et personne n’était là.

J’étais devenu si solitaire que je ne parlais plus à personne, je ne changeais jamais d’endroit et je devenais si mal en point. Peut-être que j’allais changer de place, peut être… allons bon de toute façon je pouvais bien faire ça, je n’avais rien à faire, je n’avais même plus le cœur à penser aux autres sauf à elle. Elle qui m’avait pris mon cœur et l’avait emprisonné à jamais. Je décidai donc de bouger un peu de mon dortoir et d’aller un peu plus haut par exemple à la tour d’Astronomie mais je n’aurai pas assez le courage pour ça, je le savais au plus profond de mon être que je ne pourrai pas monter si haut, j’étais devenu une vraie larve. Je ne faisais plus rien de mes journées donc c’est vrai que je ne pouvais pas avoir assez d’énergie pour ça. Mais je savais aussi que je pourrais être avec mes amis quand je voulais mais je n’osais pas, j’avais toujours aussi peur de faire mal, mal aux êtres qui m’étiaent chers. C’était de la faute de mon père, il avait tué ma propre mère… il l’avait tué devant moi…

Je m’installais donc tranquillement dans les escaliers lorsque j’entendis une voix qui m’appelait, j’étais si pensif… je ne pouvais pas m’empêcher de penser en ce moment et je n’étais pas dans ce monde où j’étais avant. C’était la fin, c’était fini, je n’avais aucun un espoir, l’espoir de ma vie « normale » était morte depuis bien longtemps. Cet amour si fort et cette attirance pour une personne que je ne connaissais depuis peu et ma demi sœur Leyna, une balance qui ne pouvait pencher que sur Antiope mais en même temps qui mettait dans le néant l’état psychologique de Leyna. J’entendais d’un seul coup « vieil peau », une seule personne pouvait m’appeler comme ça mais je ne bougeais pas… je ne pouvais pas bouger, mes larmes coulaient, mon esprit était encore plus troublé avec cette arrivée.

« Ne m’appelle pas vieil peau, n’oublies pas qu’on a le même âge et même si les gens croient que tu étais plus jeune, on est égaux. »

Il me posait tellement de questions et moi je ne voulais pas lui faire de mal et pourtant mon regard était si froid pas une once de gentillesse sur mon visage.

« Si tu savais ton carré a disparu, il n’existe plus depuis bien longtemps, depuis que ses monstres ont pris l’école, il n’y a plus d’amitié, il n’y a plus rien. Je ne vais pas combattre trop de gens se sont sacrifiés pour que je vois encore du sang devant moi. C’est fini pour moi Dougie, je ne peux pas venir va te battre si tu le veux mais moi je reste ici, je ne peux faire que ça de toute façon sinon je ferai souffrir des gens… »

Je regardais les marches, les yeux vident et je ne disais plus rien.